50 Ans: Un Anniversaire entre Solitude et Bonheur

Nous sommes le 1er février 2023. J’ai 50 ans.

Depuis un an, depuis l’anniversaire précédent, j’imaginais comment j’allais fêter ça, qui j’aurais voulu avoir à mes côtés à ce moment-là. Un moment censé marquer le début de ma seconde jeunesse (de mon point de vue).

J’avais réfléchi au menu, aux boissons, aux cocktails, aux amuse-bouches. Peut-être un bon chili con carne, que je réussis bien et que j’adore. Et puis danser, danser, danser. Une vraie fête.

Au réveil, Bruno et Linda me serrent dans leurs bras et me donnent un bisou d’anniversaire. Rien que ça m’a réchauffé le cœur et allégé un peu le poids de cette journée.

Je me suis dit : même si on savait déjà que ce serait une journée de merde, autant se faire belle pour la photo Facebook, au moment où on me rendrait enfin mon téléphone.

D’habitude, Facebook me bombarde de vœux dès minuit. Mais là, silence total.

Rien. Aucun message. C’est à ce moment que j’ai compris que j’étais isolée. Complètement seule dans cette ville.

J’enfile ma robe noire longue, mais il fait un froid de chien. Dans la communauté, il n’y a pas de chauffage, et cet hiver-là est particulièrement glacial (en tout cas pour moi).

Je me fais prêter un gilet pour mettre par-dessus. Parce que là, franchement, c’est impossible : trop froid !

Je ne me rappelle pas avoir déjeuné. Je me rappelle m’être reposée un peu à la pause, et d’avoir travaillé : c’était mon tour pour les salles. Après le dîner, nettoyer la salle à manger, c’était pour moi.

Pas de cadeaux. Uhm. Ah si, un “cadeau” arrive. Dans l’après-midi, l’huissier vient me remettre la convocation devant le Tribunal des mineurs.

Voilà. Le moment où je pensais qu’on allait enfin pouvoir rentrer chez nous, comme on m’avait fait croire.

Mais sérieusement, est-ce que tout doit vraiment aller aussi mal aujourd’hui ? Elles ne peuvent pas être un peu gentilles avec moi ?

Je veux dire, j’ai 50 ans aujourd’hui. Je ne peux pas fêter ça dehors avec mes enfants. Je dois rester enfermée ici. Je n’ai même pas droit à un petit truc pour marquer le coup ?

Je rentre dans le confessionnal, déterminée à obtenir au moins une petite chose, quelque chose juste pour moi.

Incroyablement, on m’accorde de commander une pizza et de choisir moi-même le gâteau.

Et là, ce sourire que j’avais perdu depuis un bon moment revient. Un vrai sourire, énorme, à 200 dents, comme je dis toujours !

Une pizza ! Un gâteau ! Mais je ne peux pas sortir l’acheter. Et je ne vais pas le faire moi-même : je dois déjà nettoyer les salles.

Et la réponse me vient… de la pizzeria. Oui, exactement : la pizzeria.

Des jeunes, Marlena et Girolamo. Pendant l’hospitalisation de Néa, j’avais raconté notre histoire à Marlena. Touchée, elle nous avait aussitôt envoyé des pizzas, des frites et quelques boissons, pour qu’on puisse manger un peu à l’hôpital. La bouffe y était vraiment médiocre, et deux anorexiques comme nous n’y touchaient presque pas.

« Allez, Néa, on prend un peu de bidoche, toi et moi. Un petit peu chacune. Ça peut faire du bien à l’humeur. »

Depuis ce jour, BurgerPizza — avec Marlena et Girolamo — est devenue mon “Toujours là”, pour toute la durée de mon séjour en communauté, jusqu’au tout dernier jour en Sicile.

Le soir de mon anniversaire, je les ai appelés, intimidée, inquiète qu’ils ne puissent pas m’aider. Et pourtant, tout de suite, ils ont eu l’idée du dessert-pizza à la place du gâteau !

Donc, non seulement un super calzone “Parigino” (mozzarella fior di latte, brocoli-rave, scamorza fumée, speck, tomates cerises, bufala effilochée et parmesan), mais aussi un dessert-pizza à la Nutella et aux fraises, rien que pour moi. Pour me faire sentir spéciale, au moins un peu.

Merci Marlena. Merci Girolamo. Ce jour-là, votre pizza a eu plus de cœur que tout le reste du monde.

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