Cuisiner avec un frigo vide : boulettes d’anchois

Le lundi ou le mardi, c’était jour de courses.
Mais pas les courses d’un foyer ordinaire.
Une liste immense, format A4, que je divisais en catégories, offres, possibilités.

Le dimanche soir, je passais des heures à éplucher les promotions sur le site du supermarché. Je faisais l’inventaire de ce qu’on avait encore, j’imaginais des menus possibles avec ce qui coûtait le moins.

Celles qui savaient cuisiner, je leur donnais les plats compliqués. Les autres, je leur confiais des choses simples, des gestes sûrs.

Mais ce jour-là, rien.
Rien d’achetable, rien de frais, pas même des pommes de terre.
Une tragédie pour les enfants.

Alors j’ai fouillé les placards.
Il me restait des anchois, un peu de pain rassis, de la menthe, des raisins secs.

J’ai fait des boulettes. Des vraies. Des boulettes d’anchois comme en Sicile.
Ce jour-là, on a mangé ce qu’il restait. Et tout le monde a souri.


Ingrédients

– 250 g d’anchois ultra-frais, écaillés et filets séparés
– 2 œufs
– 1 c. à soupe de farine de blé dur
– 1 c. à soupe de pignons
– 1 c. à soupe de raisins de Corinthe
– 100 g de pecorino sicilien (ou équivalent)
– 10 feuilles de menthe fraîche
– 1 à 2 c. à soupe de chapelure
– Sel & poivre noir du moulin
– Huile d’olive vierge extra pour la friture


Préparation

Coupez les anchois en petits morceaux et mettez-les dans un saladier.
Ajoutez tous les autres ingrédients et mélangez jusqu’à obtenir une pâte compacte et homogène.
Formez des boulettes à la main. Faites-les frire dans une huile chaude (mais non brûlante).
Égouttez-les sur du papier absorbant.
Servez chaud, accompagné d’oignons rouges caramélisés.


🌿 Et vous ?

Vous souvenez-vous d’un plat improvisé, préparé un jour sans rien ?
Qu’auriez-vous cuisiné à ma place ?

La Magie des Dimanches avec Claudia en Cuisine

Le dimanche, au foyer, était assez ennuyeux quand on décidait de rester.
Mais quand Claudia était de service en cuisine, c’était la fête.
Une fête simple, douce, bruyante parfois,
comme si on était une grande famille.

Le rituel commençait dès le matin, parfois même la veille,
avec la préparation du ragù à la palermitaine.
Contrairement au célèbre bolognais, celui-ci contient des petits pois,
et un mélange de viande hachée de veau et de porc.
Dans la version ancienne, on utilisait des morceaux entiers de viande
qu’on effilochait à la main, après des heures de cuisson lente,
comme dans un chaudron suspendu à la cheminée.

Le matin ou l’après-midi, on allait faire un tour au parc,
parfois jusqu’aux manèges,
et ensuite, tout le monde attendait que les anelletti fumants sortent du four
pour atterrir dans nos assiettes.

C’étaient les dimanches où on redevenait enfants.
Les dimanches où on oubliait ce qu’on était en train de vivre.
Les dimanches où on se sentait un peu moins seules.

Grâce à Claudia. Grâce à la cuisine.

Ce jour-là, c’est elle qui préparait la pasta col forno.
J’en ai noté la recette ici :

“Pasta col forno” : Recette Traditionnelle Palermitaine

« Pasta col Forno » : Recette Traditionnelle Palermitaine

À Palerme, ils ne disent pas “pâtes au four”,
mais bien pasta col forno,
avec ce mélange d’italien et de dialecte qui dit tout d’un lieu.

Ce plat, je l’ai découvert un dimanche au foyer.
Et depuis, il ne m’a plus jamais quittée.

🍝 La recette des anelletti au four

Ingrédients pour 4 personnes :

  • 350 g d’anelletti (petites pâtes en anneaux)
  • 250 g de viande hachée de veau
  • 200 g de petits pois
  • 70 cl de purée de tomates
  • 1/2 oignon
  • 1/2 carotte
  • 1 branche de céleri
  • Un peu de persil (selon le goût)
  • Un peu de basilic (selon le goût)
  • 50 g de caciocavallo râpé (ou comté)
  • 1 verre de vin blanc sec
  • Huile d’olive extra vierge
  • 1 noisette de beurre
  • Chapelure
  • Une pincée de sucre
  • Sel et poivre

Préparation :

  • Hachez finement l’oignon, la carotte, le céleri et le persil. Faites-les revenir dans 4 cuillères à soupe d’huile d’olive et une noisette de beurre.
  • Ajoutez la viande hachée et faites-la dorer sans la brûler. Déglacez avec le vin blanc.
  • Incorporez les petits pois, puis la purée de tomates. Salez, poivrez, ajoutez le basilic et une pincée de sucre. Faites mijoter à feu moyen pendant 40 minutes, en remuant régulièrement. Ajoutez un peu d’eau si nécessaire pour éviter que la sauce ne sèche.
  • Faites cuire les anelletti dans de l’eau bouillante salée pendant 5 minutes seulement, afin de les garder très al dente.
  • Égouttez les pâtes et mélangez-les avec la sauce et une cuillère à soupe de caciocavallo râpé.
  • Beurrez un plat (ou des moules individuels) et saupoudrez de chapelure. Retirez l’excédent avec un pinceau.
  • Versez les pâtes dans le plat, recouvrez de chapelure et du reste du fromage râpé.
  • Faites cuire au four à 200°C pendant 40 minutes. Ne pas utiliser le gril.

📖 Ce plat, je l’ai découvert au foyer, un dimanche de mars.
C’est Claudia qui le préparait.
Je raconte ce souvenir ici : La Magie des Dimanches avec Claudia en Cuisine

Nuits Étoilées: Pensées et Émotions à l’Aube

3 heures du matin.

Réveil.
Comme toujours, comme chaque jour.
Même au foyer, je me réveillais sans faute.
Mais je ne pouvais pas connaître l’heure :
les téléphones étaient interdits.

Chaque nuit, la même histoire.

Je devais me fier à la lumière de la lune.
Je fumais encore, à l’époque. Je me levais doucement,
je sortais sur le balcon pour ne pas réveiller Linda et Bruno.
Je restais là, bloquée dans mes pensées.

Mais il n’y avait pas grand-chose à penser.
Enfin… il y avait trop à penser,
mais rien à faire.

Alors je regardais le ciel étoilé.
Les goélands, invisibles, cachés sur le toit de l’école d’en face,
prêts à plonger dans les poubelles
ou dans la piscine du gymnase tout proche.

J’avais appris à lire l’heure à la position de la lune.
C’était ma montre lunaire. Précise. Froide.

Aujourd’hui encore, je me réveille à 3 heures.
Pourquoi ?
Quelqu’un a une idée ?

La place vide : Un symbole d’amour et d’espoir

Il y a une place vide sur le canapé.
Il y a une place vide dans ce grand espace.

D’un côté, il y a Momo.
De l’autre, il y a Pucci.
Et moi, je suis au milieu.

Et pourtant,
il y a une place vide : la tienne.

L’absence de ton être manque.
Tu remplis l’espace,
l’esprit,
le cœur.
Tu es.

On regarde la porte.
On regarde la fenêtre.

On espère te voir surgir soudain,
plutôt que de t’imaginer allongée sur ce lit,
dans un hôpital stérile,
incapable de te donner notre chaleur —
celle dont tu aurais tellement besoin,
maintenant.

Tu reviendras peut-être en morceaux.
Avec de nouvelles fissures,
des fautes mal recousues,
et des silences plus larges que tes poches.

Pas besoin d’excuses.
Ni de fleurs. Ni d’explications.
Si tu reviens, il me suffit que tu t’assoies.
Même en silence. Même de travers. Même pour un instant.

Et si tu ne reviens pas ?
Je t’aimerai quand même.
À distance. En absence. En différé.

Parfois, l’amour, c’est ça :
pas un pont,
mais une chaise laissée là
pour celle qui, un jour,
pourrait avoir froid.

Papillons Jumelles : Poème sur la Fraternité

par Linda, pour sa sœur Néa

[Strophe 1]

Tu m’as soignée quand ce n’était pas ton rôle,
tu as arrêté mes larmes avec des mains blessées,
tu marchais courbée, mais tu me soutenais,
en silence, toujours, avec une force jamais disparue.

Tu avais une aile brisée, déchirée par le vent,
et moi je la voyais, même quand toi non.
Je te prêterais la mienne sans une plainte,
car avec toi, chaque douleur s’efface doucement.


[Strophe 2]

Quand je tombe, tu es là, avec ta voix,
à transformer un enfer en refuge.
Tu es tempête, tu es pluie brûlante,
mais tu es aussi soleil, amour permanent.

Ils disent qu’on se ressemble,
et j’en suis fière comme d’un trophée.
Nous sommes deux rides sur la même peau épaisse,
deux yeux différents avec un même dessin.


[Refrain]

Nous sommes des papillons jumelles, éclatées dans le ciel,
une route nous sépare, mais le cœur est le même.
Je te tiens la main, même si c’est un duel,
on vole séparées, mais on tombe dans le même élan.


[Strophe 3]

Maintenant, on prend deux chemins différents,
des routes éloignées mais toujours alignées.
Toi tu rêves fort, moi j’écris des chansons,
mais même à distance, nos âmes sont entremêlées.

Je ne t’ai jamais dit que tu es une fleur rare,
une beauté qui fend le silence en deux.
Même quand tu cries, même quand tu t’écroules,
tu es ce qui reste quand le monde brûle tout.


[Refrain – Final]

Nous sommes des papillons jumelles, éclatées dans le ciel,
une route nous sépare, mais le cœur est le même.
Je te tiens la main, même si c’est un duel,
on vole séparées, mais on tombe dans le même élan.

Guérison par l’Amour : Choix et Évolution Personnelle

Citation extraite du livre

“On tombe malade par amour, on guérit par amour”
d’Ana Maria Sepe et Anna De Simone (Psychoadvisor)

Personne n’a l’obligation de te choisir,
de te suivre, de t’apprécier
ou de te partager.

De la même manière,
personne n’a le droit de te rabaisser,
d’ignorer tes besoins,
de te faire sentir fautive, invisible ou insignifiante.

Pas même toi.

Tu ne peux forcer personne.
Tu peux seulement faire des choix sages,
faire valoir tes droits.

Le reste viendra de lui-même
et sera la conséquence naturelle
de ton évolution personnelle.


📚 Source :
Ana Maria Sepe et Anna De Simone,
« D’amour on tombe malade, d’amour on guérit », Psychoadvisor, Rizzoli éditions.

(Traduction libre d’un extrait du texte original en italien.)

Lettre à ma fille : un appel à la vie

à ma fille – pour Néa

Je te vois.
Avec ces yeux qui parfois veulent disparaître,
baissés, fatigués,
comme si regarder le monde faisait trop mal.

Je te vois là, entre deux mondes.
Entre le plus jamais et le pas encore,
dans ce silence suspendu
de celles qui retiennent leur souffle,
en espérant que la faim passe,
que la chair s’efface,
que l’âme suffise.

Et je sais.
Car moi aussi, j’y suis passée.
Moi aussi, j’ai cru que me vider
me rendrait plus vraie,
plus légère,
plus digne.

Mais mon amour,
l’âme a besoin d’un abri.
Et cet abri, c’est toi.
Avec ton sang,
avec ta chair,
avec tes mains qui tremblent
et ta voix qui dit « stop ».

Je t’aimerai toujours.
Toujours.
Même si tu restes fermée,
même si tu t’arrêtes,
même si tu choisis de ne pas te montrer.

Mais mon amour ne suffit pas
à te garder en vie.
Si tu ne manges pas,
le « toujours » s’use,
et risque de devenir « jamais ».

Moi, je veux que tu sois toujours.
Pas une ombre.
Pas un souvenir.
Pas un écho.

Que tu sois chair,
et voix,
et corps en marche.
Que tu restes.
Même si c’est juste pour dire :
« Aujourd’hui je n’y arrive pas. Mais peut-être demain. »

Et moi, je serai là.
Non pas pour te faire fleurir maintenant,
mais pour attendre ce jour-là.

Celui où, sans hâte,
tu déboucheras la bouteille
où tu as enfermé ton âme.

Et tu la laisseras danser.

Derrière la vitre, le silence du verdict

J’entre.
Je me rends compte que dans la salle, il y a une autre personne qui a tout l’air de vouloir me faire chier : l’avocate de mon ex-mari, son père.

Là aussi, je me demande pour quelle raison il y aurait besoin d’un énième avocat, vu que je suis à Palerme et pas lui, qui vit dans un autre État — et en tout cas, pourquoi il n’a pas demandé qu’on en prenne un ensemble.
Je le comprendrai bien plus tard, avec regret.
Ou peut-être… je commence déjà à le sentir.
Peut-être que cette histoire n’est qu’un début, un prétexte.
Mais à ce moment-là, je ne le vois pas encore clairement.

Je réponds à toutes les questions.
Mon avocate me fait un signe des yeux.
Ça signifie que je suis en train de bien m’en sortir, qu’il y a de l’espoir.

Je viens à peine de finir de parler, et la sorcière (l’autre avocate) [ici, on trouvera un surnom qui ne risque pas une plainte, c’est-à-dire un nom de sorcière célèbre ou un personnage du style de Mademoiselle Rottenmeier] dépose un document et affirme, d’un ton décidé :

« Madame la Juge, mon client et moi demandons l’interdiction pour la mère de voir Néa. »

Les motivations sont hallucinantes.
Je l’encouragerais au suicide, à l’anorexie ! Mais on plaisante là ?!

Un mois avant, je l’emmenais partout où elle voulait, juste pour qu’elle mange !
Qu’est-ce qu’elle a fumé, celle-là ?

Je ne peux pas résister, je dois absolument le dire :
que mon ex-mari n’a jamais été présent dans la vie de nos enfants ces deux dernières années,
que j’ai dû affronter chaque défi toute seule,
que Néa avait commencé à se scarifier quand elle était avec lui en Allemagne,
et qu’il n’a absolument rien fait pour l’aider.

Si une interdiction devait être appliquée à moi,
il fallait faire la même chose pour lui.

Évidemment, ça ne s’est pas passé comme ça.

Évidemment, la Juge a appliqué l’interdiction seulement à moi.

À partir de ce moment-là, jusqu’aux dix-huit ans de Néa,
je n’ai plus jamais pu voir ma fille toute seule.